Par principe, pour affirmer qu’il y a un coût humain à
l’expropriation,
En solidarité avec tous ceux qui souffrent de celle-ci et
qui n’ont pu rien dire,
nous avions préparé 2 courts textes que nous avons pu dire à
l’audience et que nous partageons avec vous.
Marcel :
« Mr le juge, Mesdames, Messieurs
Je voudrais dire un mot sur la dimension humaine de cette
expropriation.
Mon épouse, née en banlieue parisienne, dans le 93
précisément, a trouvé ici un métier qui lui plait après avoir été conseillère
agricole puis enseignante.
Moi, mes parents, petits paysans du sud manche, étaient
fermiers. Par deux fois, ils ont remis en état une exploitation, puis ont été
remerciés par les propriétaires. Ils m’ont toujours dit « fait des études,
il n’y a pas de place pour nous à la ferme ». J’ai effectivement fait des
études, mais, nous avons avec Sylvie, réussi à avoir une place pour exercer le
métier d’éleveur, ce qui est notre nature profonde.
Une des raisons de notre choix au Limimbout est que lors du
premier contact avec les agriculteurs les plus proches, ceux-ci nous aient
dit :«on préfère avoir des voisins que des hectares ».
Voilà, c’est tout cela que vous explosez en nous
expropriant.
Je voudrais en conclusion vous lire une partie d’un texte
écrit par notre fille à ce sujet.
Ce projet m’a refusé
l’illusion d’une protection, il m’a plongé trop tôt dans l’insécurité de ce
monde. J’ai dû grandir en sachant le futur incertain, j’ai dû me construire
dans la précarité. J’ai accepté le fait de ne pas faire de projets, de ne pas
me projeter dans l’avenir. Et c’est ainsi une partie de mon enfance que cet
aéroport m’a arraché. Cela peut sembler anodin, mais même à présent, je n’ai
aucune confiance en l’avenir. L’insécurité laisse des traces que même le temps
ne parvient pas à effacer. Pour nous, enfants ayant grandi avec ce poids, le
monde a vite perdu son caractère enchanté et la réalité nous rattrape … »
Sylvie :
« Depuis 13 ans que nous sommes à Notre Dame des Landes, nous avons fait
revivre une des fermes du Liminbout bien délaissée à notre installation. Nous
avons remis en état bâtiments, parcelles et haies de l’exploitation. Nous avons aménagé ce
petit coin de territoire.
Nous sommes amenés à parler argent par la force des
choses. Nous, ce n’est pas en soi l’argent qui nous intéresse. Ce qui nous
préoccupe, c’est d’obtenir réparation du préjudice causé, c’est d’obtenir une
compensation équitable de ce que vous voulez détruire.
Vous, AGO, vous avez votre conception d’aménageur. Nous,
nous avons la nôtre. La nature que vous détruisez n’a pas beaucoup voix au
chapitre. Nous avons la chance de travailler avec elle en faisant de notre
mieux pour la respecter.
Si compenser seulement ce que vous allez détruire vous
parait trop cher, arrêtez, arrêtez tout, tout de suite. Nous ne demandons pas à
partir ; c’est vous qui nous mettez dehors.
Alors, si vous persistez, donnez nous les moyens de
reconstituer ailleurs ce petit joyau de verdure que nous avons aujourd’hui
entre les mains. »
Sinon, que dire ? Une page de plus se tourne… Notre
sort « financier » est entre les mains de la justice. Mais notre vie
est toujours entre les mains des politiques.
Il n’est pas trop tard pour tout arrêter. Les travaux ne
sont pas commencés même si les porteurs du projet semblent faire une grande opération
de communication du type « Notre Dame, c’est démarré ! » avec
cette vague de destruction de maisons, faite également pour vider la zone des
nouveaux habitants à la veille de l’hiver.
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