samedi 8 décembre 2012

Vigie postale Elysée - Lettre n° 8
Etudier les alternatives
Michel Tarin - 17/10/2012

Michel Tarin
avec  le soutien de la coordination des opposants au projet de nouvel aéroport

                                                                  à Monsieur le Président de la République
                                                                  Palais de l’Elysée
                                                                  55 rue du Faubourg Saint Honoré
                                                                  75008 PARIS

Copie à Monsieur Frédéric Cuvillier, ministre délégué en charge du Transport

Treillières, le 17 octobre 2012
Monsieur le Président,

Vous avez reçu ces dernières semaines des courriers de Marcel et Sylvie Thébault, de Brigitte et Sylvain Fresneau et de Chantal et Thierry Drouet, de Geneviève Lebouteux, de Jacques Chiron, de Françoise Verchère,  et de Patrick Baron soutenus par l’ensemble de la coordination des opposants au projet de nouvel aéroport à Notre Dame des Landes, vous demandant un entretien. Les réponses à ces courriers nous renvoyant systématiquement vers Monsieur Frédéric Cuvillier – que nous avons déjà rencontré - nous souhaitons vous rappeler que, c’est avec vous personnellement que nous voulons discuter. Je réitère donc aujourd’hui notre demande d’entretien au nom de la coordination des opposants.

Monsieur le Président, je suis un paysan en retraite, âgé de 65 ans ; j’ai passé 41 ans à cultiver les terres de Notre Dame des Landes, cinquième génération à travailler et vivre dans ce magnifique bocage, ma famille étant arrivée en 1838 et notre fils aîné ayant pris la suite sur l’exploitation.

Je suis opposant au projet de nouvel aéroport depuis le début des années 70 et l’évolution du projet dans le temps n’a fait que renforcer ma détermination. Je ne reviendrai pas sur les arguments justifiant notre opposition mais je tiens à vous rappeler que les atouts de l’aéroport actuel de Nantes Atlantique sont réels puisqu’il vient d’être reconnu comme meilleur aéroport régional en Europe. Dans quelques mois, le ministre chargé des transports  rendra ses arbitrages sur les projets d’infrastructures qui vont devoir être abandonnés pour cause de restrictions budgétaires.  
Je vous conjure, Monsieur le Président, de faire en sorte que le projet de nouvel aéroport que porte votre Premier Ministre, soit abandonné à cette occasion, sous peine d’être taxé de favoritisme abusif tant il est vrai que ce projet d’aéroport ne trouve aucune justification sensée dans le contexte économique, financier, social et environnemental actuel.  Les récentes informations sur le ralliement des villes, de l’ouest notamment, par des liaisons TGV en lien avec le développement d’Orly, ne font que confirmer le fait que créer une nouvelle infrastructure pour Nantes est irresponsable et que, si besoin était, une optimisation de l’actuel aéroport international de Nantes Atlantique est envisageable.

Mais, Monsieur le Président, tous les atouts contenus dans les alternatives proposées et l’évidence du coût pour la société (cf étude du cabinet CE Delft demandée par le collectif d’élu-e-s) ont été rejetés par les porteurs du projet. Le plus insupportable pour moi est le refus total de débat que nous opposent les responsables politiques au pouvoir - tous membres du Parti Socialiste -  dans toutes les collectivités territoriales de notre région.

J’ai toujours voté à gauche, Monsieur le Président, et le 6 mai 2012, pour la première fois de ma vie de citoyen, j’ai voté par procuration car ma condition physique ne me permettait plus de me déplacer. Ce jour-là était en effet, pour moi, le 26ème jour d’une grève de la faim collective pour obtenir enfin une ouverture de dialogue. C’est suite à votre élection et à votre engagement personnel auprès de nos élus de Nantes Métropole, du département de Loire Atlantique et de la Région Pays de la Loire, que nous avons enfin trouvé un accord de principe pour arrêter notre grève de la faim le 8 mai, soit après 28 jours.

Mais depuis, Monsieur le Président, rien n’a évolué sur cette ouverture de dialogue et pourtant nous avons rencontré, avant et après votre élection, plusieurs personnalités de votre entourage :
  • M. Le Roux, Député de Paris,
  • M. Ries, Sénateur du Bas Rhin et Maire de Strasbourg,
  • M. Le Foll devenu Ministre de l’Agriculture,
  • Mme Duflot, devenue Ministre du Logement,
  • M. Guibert, président du pôle écologique du PS,
  • M. Warin, président du club Voltaire D/12 de l’ENA (votre promotion)
  • M. Cuvillier par l’intermédiaire de son chef de cabinet au ministère du Transport M Kesler,
  • M. Peiro, Député de Dordogne,
  • M. Glavany, ancien Ministre de l’Agriculture
Toutes ces personnalités du Parti Socialiste, dont beaucoup vous sont très proches, nous ont écoutés, ont semblé intéressées par nos propositions et devaient vous en rendre compte. Je crois que cela a été fait. Faut-il vous rappeler que Madame Royal et Monsieur Montebourg s’étaient prononcés pour une remise à plat du dossier de Notre Dame des Landes, lors des Primaires socialistes ?

Alors pourquoi les trois responsables politiques de nos collectivités territoriales, membres du parti socialiste, ont-ils écrit trois jours après la fin du mouvement de grève de la faim, qu’il n’y avait rien de changé, qu’ils étaient seulement intervenus pour des raisons humanitaires et pour donner une porte de sortie à une action d’irresponsables ?

Pourquoi, le 21 juin dernier, quelques semaines après votre élection, une répression jamais égalée par le pouvoir précédent, a-t-elle été lancée contre les paysans demandant seulement au préfet de repousser la date des enquêtes publiques organisées en plein mois de juillet, synonyme de vacances pour beaucoup ? Résultat de cette répression : 5 blessés et le président de l’ADECA (Association de Défense des Exploitants Concernés par le projet d’Aéroport), Sylvain Fresneau, traîné devant un tribunal comme un activiste irresponsable ; le tracteur du GAEC mis sous séquestre – une première aussi dans l’histoire paysanne française ! Pourtant vous l’aviez reçu quelques jours avant votre élection, accompagné de son épouse Brigitte et de Philippe Collin, porte parole de la Confédération Paysanne.

Pourquoi avoir fait parquer comme des bestiaux les militants anti-aéroport montés à Paris avec juste leurs banderoles en poche, le vendredi 14 septembre lors de la conférence environnementale ?

Pourquoi tant de brutalité de la part de la police envers une poignée de militants qui voulaient interpeller M. Montebourg, en visite avec le Premier Ministre sur le site d’Airbus à Bouguenais, ce dernier lundi ?

Pourquoi faire déployer un dispositif policier hors de proportion pour expulser quelques occupants pacifiquement  installés sur la zone, ces derniers jours et détruire des maisons habitables ?

Aucune réponse à nos demandes de dialogue sur le fond du sujet ne nous est jamais parvenue. Un très mauvais climat et un rejet important de la part de nos responsables du Parti Socialiste se sont installés durablement. Depuis dix ans que ce refus de dialogue existe, plusieurs élus et membres du PS ont quitté le parti. Beaucoup de citoyens qui ont voté utile en mai dernier, se posent bien des questions aujourd’hui. Des débuts de désaccord apparaissent au sein de la section du PS 44 – entre autre au sein de la commission agricole qui ne peut absolument soutenir un projet qui condamne le principal bassin laitier de la région et qui s’apprête à bafouer la Loi sur l’Eau, loi que respectent tous les élus locaux dans l’aménagement de leurs communes.

Monsieur le Président, tout cela renforce encore notre détermination à faire abandonner ce projet inutile, nuisible et ruineux. La gauche devra-t-elle l’imposer par la répression, les coups de matraque et les gaz lacrymogènes alors qu’une vraie concertation et un engagement de changement par la reconnaissance des alternatives proposées seraient la solution. Notre détermination de résistance s’accompagne d’un engagement aussi déterminé pour être force de proposition et arriver à une sortie positive et vraiment d’utilité publique de ce projet du passé.

Vous avez dit, Monsieur le Président, « le changement c’est maintenant ». Nous, nous le voulons !
Dans l’attente de vous rencontrer, je tiens à vous assurer, Monsieur le Président, de ma haute considération.

Michel Tarin

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